Consultation sociale : l'expert du CSE peut réclamer les DSN pour analyser l'évolution des rémunérations
L’expert-comptable réclame les DSN pour analyser l’évolution des rémunérations depuis 5 ans
Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, un comité central d'entreprise (qui, en application de la réforme des institutions représentatives du personnel, deviendra un CSE central en cours de procédure) avait décidé de recourir à un expert-comptable en vue de la consultation sur la politique sociale de l'entreprise, expertise prise en charge à 100% par l'employeur
L’expert-comptable était notamment chargé par le CSE d’analyser l'évolution de la rémunération « depuis 5 ans » et d’étudier la politique de recrutement et les modalités de départ, en particulier des ruptures conventionnelles et des licenciements pour inaptitude.
L’employeur avait refusé et le conflit autour de l’expertise a été porté devant les tribunaux. L’employeur contestait l’étendue de l’expertise et sollicitait une réduction de son coût et de sa durée (en l’occurrence, l’expert avait fixé la durée de sa mission entre 46 et 47 jours avec un montant total d'honoraires compris entre 55 800 euros et 58 280 euros € HT).
Donnant droit à l’expert, les juges ont exigé de l’employeur qu’il lui communique, sous astreinte, les DSN réclamées, estimant qu’elles étaient nécessaires pour analyser l'évolution de l'emploi, des qualifications et de la rémunération des salariés.
Pour la Cour de cassation, l’analyse de l’évolution de la rémunération entre dans la mission de l’expert-comptable
Dans son arrêt du 23 mars 2022, la Cour de cassation précise l’étendue de l’expertise qui peut être menée dans le cadre de la consultation du CSE sur la politique sociale de l’entreprise.
Pour se prononcer, la Cour rappelle les dispositions légales supplétives quant au contenu de cette consultation, c’est-à-dire les sujets sur lesquels elle porte (évolution de l’emploi, qualifications, actions de formation, etc.) (c. trav. art. L. 2312-26, I), et quant aux informations que l’employeur est tenu de mettre à disposition du CSE à cet effet dans la base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE) (c. trav. art. L. 2312-26, II et L. 2312-36).
Sur le contenu de la BDESE, qui rappelons-le diffère selon que l’entreprise compte moins ou au moins 300 salariés, elle rappelle également les dispositions réglementaires supplétives applicables (c. trav. art. R. 2312-9). Celles-ci prévoient que dans les entreprises d'au moins 300 salariés (ce qui devait être l’effectif de l’entreprise dans cette affaire), la BDESE comporte, s'agissant de « l'investissement social », certaines informations chiffrées dont le nombre d'embauches en CDI et CDD, le total des départs, le nombre de démissions, le nombre de licenciements économiques et pour d'autres causes, le nombre de fins de CDD, le nombre de départs au cours de la période d'essai, le nombre de promotions, le nombre de salariés déclarés inaptes, des informations chiffrées en matière d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (promotions, rémunération moyenne ou médiane mensuelle par catégorie professionnelle, etc.), ainsi que, s'agissant de la rémunération des salariés et des dirigeants, dans l'ensemble de leurs éléments, le pourcentage des salariés dont le salaire dépend, en tout ou partie, du rendement.
Au regard de ces dispositions, la Cour de cassation estime que l'analyse de l'évolution de la rémunération dans toutes ses composantes et l'analyse de la politique de recrutement et des modalités de départ, en particulier des ruptures conventionnelles et des licenciements pour inaptitude, entrent bien dans la mission de l'expert désigné dans le cadre de la consultation sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi.
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